A deux lieux à peine de Collinée, source du petit fleuve de la Rance, il y a Boquen...

Depuis le cloitre vu sur la Salle du Chapitre et l’Armarium.
Avant propos
Les deux Roianteline
Quelques chartes très anciennes de Bretagne citent, au XIIᵉ siècle, deux femmes portant le nom de Roianteline. Malheureusement, l’histoire n’a véritablement retenu que l’une d’entre elles : Roianteline, fille de Riutal, vicomtesse de Dol, que nous connaissons par une charte conservée.
Elle fut l’épouse du vicomte d’Alet, Hamon, et la mère du tout premier seigneur de Dinan, Josselin (Goscelinus).
Si elle possédait de nombreux biens, notamment autour de Combourg, elle détenait également des terres à Chavagne, près de Rennes, où elle établit une communauté religieuse féminine.
Roianteline apparaît comme vicomtesse de Dol lors de la fondation du prieuré de Saint-Pern, donné à l’abbaye de Saint-Nicolas d’Angers : assuit vicecomitissa de Dolo, mater Riwaloni vicecomitis.
Ce jour-là, deux de ses fils — Riwallon, vicomte de Combourg, et Josselin de Dinan — se tiennent à ses côtés.
Plus tard, lors de la fondation de l’abbaye Saint-Georges de Rennes, voulue par Alain III duc de Bretagne, Roianteline donna à cette nouvelle abbaye ses biens de Chavagne, c’est-à-dire sa communauté religieuse.
À la même époque, dans la même génération, nous trouvons une seconde Roianteline, épouse du vicomte Eudes, seigneur du Porhoët, très probablement parent proche de Guethenoc. Celui-ci, époux d’Alarum, fille du comte de Cornouaille, fut la souche des seigneurs du Porhoët, et son fils Josselin en fonda la ville seigneuriale. Quant au vicomte Eudes, frère ou proche parent de Guethenoc — les sources ne le disent pas — il ne laissa aucun héritier : son union avec cette deuxième Roianteline demeura stérile.


L’ancien armarium ou armoire en laquelle était ranger les livres.

L’ancienne Salle du Chapitre.
L’histoire a cependant conservé de lui son testament. N’ayant pas d’enfant, Eudes — probable vicomte du Porhoët — choisit pour unique héritier le duc de Bretagne lui-même, Geoffroy, fils de Conan Iᵉʳ.
Ce Geoffroy fut le père d’Alain III, duc de Bretagne, et d’Eudes, comte de Penthièvre. Avant de mourir, le vicomte Eudes remit donc à Geoffroy Iᵉʳ tous ses biens de Chavagne.
En somme, Eudes transmit au duc Geoffroy, notamment à travers les dîmes et taxes, l’ensemble de ses revenus attachés au bourg de Chavagne. Geoffroy mourut en 1008. Ce transfert eut lieu avant son mariage, puisque Geoffroy Iᵉʳ offrit ensuite, en cadeau de noces à son épouse Havoise de Normandie, ledit bourg de Chavagne.
Ainsi, le patronyme « Josselin » et l’ancienne paroisse de Chavagne semblent réunir en une seule et même figure nos deux Roianteline : la première, veuve du vicomte Eudes, devenant l’épouse du vicomte Hamon d’Alet.
Hamon fut choisi par le duc Geoffroy Iᵉʳ pour être le tuteur — le « gouverneur » — de ses deux enfants, Alain et Eudes.
L’histoire rattache Hamon, comme « fils », au vicomte Hamon tombé en 992 aux côtés de Conan Iᵉʳ sur le champ de bataille de Conquereuil.


La magnifique charpente de l’abbatiale avec son escalier aérien.
Des chartes de l’abbaye de Saint-Nicolas d’Angers, du prieuré de Saint-Pern et de l’abbaye de Saint-Georges de Rennes précisent clairement que Roianteline, épouse d’Hamon d’Alet, était « vicomtesse de Dol » et fille de Riutal.
Comment entra-t-elle en possession de la vicomté de Dol-Combourg par son père ? Était-ce bien par ce Riutal attesté ?
Celui-ci ne semble pourtant avoir été que le bouteiller de Dol à son époque. Tout conduit donc à penser que Roianteline fut, par sa mère, la petite-fille d’Alain, dernier comte de Dol — lui-même identifié à Alain Barbetorte, duc de Bretagne, mort en 952.
Lors de la fondation de l’abbaye Saint-Georges de Rennes, Roianteline donna sa seigneurie de la Chapelle-Janson.
Elle offrit aussi plusieurs métairies situées dans le pays de Combourg et en la paroisse de Pleine-Fougères, ainsi que tout ce qu’elle possédait à Saint-Séglin. Elle y ajouta une vingtaine de bœufs, douze vaches et dix-huit chevaux. Enfin, elle remit sa congrégation féminine cénobitique établie à Chavagne.
À défaut d’avoir été « vicomte de Dol », son père Riutal fut-il « bouteiller » de Dol ?
L’histoire mentionne en tout cas un fils de Roianteline, né semble-t-il hors mariage : Hugues, père de Geoffroy. D’Hugues semblent descendre les premiers Butellarius de Dol — Hervé, Rialtus (ou Riwaldus Butellarius), Hato et Guillaume Butellarius — tous qualifiés « hommes » de l’archevêque de Dol, Junguené. Le titre de Butellarius (bouteiller) désignait celui qui gardait notamment les sceaux, et il donna naissance aux patronymes Butellarius, Boterel, Botrel ou encore Boutreau.
Lorsque Junguené, archevêque de Dol, fils d’Hamon d’Alet et de Roianteline, et donc frère de Josselin de Dinan, offrit à l’abbaye de Saint-Sauveur de Redon, avec l’accord de ses frères, leur paroisse de Guenidell, figurèrent parmi les témoins Riwaldus Butellarius, ainsi que Hato et Guillaume Butellarius, ses hommes directs.
Hamon le vicomte et Roianteline, vicomtesse de Dol, eurent pour fils aîné Hamon II, vicomte d’Alet. L’un de ses puînés, Josselin, fut à l’origine de la seigneurie de Dinan, en Poudouvre (région comprise entre Arguenon et Rance, de la mer au Porhoët ; Paoudour signifiant « le pays entre les deux eaux »).
Hamon II eut pour fils Hamon III, vicomte d’Alet à son tour. Avec lui, la vicomté d’Alet semble disparaître, remplacée par une nouvelle vicomté : celle du Poudouvre. Brient Vetulus, qui se prétendait descendant des comtes du Poudouvre lors de la fondation de l’abbaye de Boquen, père d’Alain, apparaît comme l’arrière-petit-neveu de Hamon d’Alet, époux de Roianteline. Brient Vetulus et Geoffroy Iᵉʳ de Dinan eurent donc un ancêtre commun : Hamon le vicomte, tombé à Conquereuil en 992.
En résumé, ce bisaïeul de Brient Vetulus était le propre oncle bisaïeul de Geoffroy Iᵉʳ de Dinan, fondateur de l’abbaye de Boquen.
Alain, fils de Brient, se proclama dans une charte de l’abbaye de Saint-Aubin-des-Bois « descendant des premiers vicomtes du Poudouvre ». Cette seigneurie, avant d’être absorbée par Dinan, eut probablement son siège près de Dinard, à Pleurtuit. Après le mariage de Muriel de Poudouvre, fille d’Alain (filius Brient), avec Geoffroy II de Dinan (branche nord), le siège du Poudouvre fut déplacé de Pleurtuit à Dinan. Vers le milieu du XVᵉ siècle, il quitta Dinan pour Pleudihen, sur les terres de la Bellière, et ne subsista plus que comme un titre d’apparat réservé aux puînés de Dinan. Le frère de Muriel, Geoffroy Balisson — lui aussi fils d’Alain filius Brient — fut le premier seigneur du Plessix, à l’origine de la seigneurie du Plessis-Balisson.

Abbatia Beate Mariae de Boquano
L’abbaye de Boquen, en Plénée-Jugon, fut de tout temps placée sous le vocable de la Bienheureuse Sainte-Marie. Elle fut voulue par Olivier II de Dinan, qui se présente lui-même, dans un écrit relatant sa fondation, comme « prince de la ville de Dinan ». Sa construction commença probablement vers 1137.
Par la seule volonté de ce seigneur, l’abbaye fut donc fondée. Petit-fils d’Olivier Iᵉʳ de Dinan, fils de Geoffroy Iᵉʳ et frère d’Alain Iᵉʳ, Olivier II avait épousé Agnorie de Penthièvre. Celle-ci, princesse bretonne née de l’union d’Étienne de Penthièvre et de Havoise de Guingamp, était l’arrière-petite-fille de Geoffroy Iᵉʳ, duc de Bretagne.



Créée à la demande du seigneur de Dinan (branche nord), le premier abbé de Boquen fut choisi en présence d’Olivier II de Dinan, le 15 octobre 1137. La nomination du premier abbé fut décidée par Monseigneur Guillaume, alors évêque de Tréguier.
Rappelons qu’après 1123, date à laquelle disparaît des chartes le nom de Geoffroy Iᵉʳ de Dinan, la seigneurie de Dinan — ville comprise — fut divisée en deux parts égales : Olivier II reçut tout le nord, de Jugon à la Rance, et son frère Alain le sud, de la Rance à Bécherel, incluant la place-forte de Léhon. Malgré cette partition claire, certaines enclaves demeurèrent ; Olivier II conserva notamment la forteresse de Jugon.
Adonias, frère de l’évêque Guillaume de Tréguier, fut ainsi choisi comme premier abbé de Boquen. Cette abbaye, fille de Bégard, se trouvait dès son origine dans le diocèse de Saint-Brieuc et relevait de l’ordre de Cîteaux. Le choix d’Adonias fut confirmé plus tard par la Chronique de Lamballe.


Homme de peu de compétence, Adonias fut, d’après l’historien Charles Taillandier, déposé et remplacé peu de temps après.
Pour la liste complète des abbés de Boquen, on peut consulter l’ouvrage de Dom Charles Taillandier (Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, 1756) ou encore celui de l’abbé Tresvaux (1839), reprenant Dom Morice dans son travail sur les abbayes de Bretagne.
Sous la commende du douzième abbé, Louis Duverger, l’abbaye de Boquen reçut la dépouille de Gilles de Bretagne, jeune prince assassiné sur ordre de son propre frère, le duc de Bretagne.
Gilles fut en effet inhumé en ce lieu saint.
De son vivant, il possédait le château du Guildo, en Créhen, et était frère des ducs François Iᵉʳ et Pierre II de Bretagne.
La sépulture de ce prince, mort jeune, insouciant et « courant le guilledou », fut recouverte d’une grande dalle d’ardoise, elle-même surmontée d’un vaste panneau de chêne sculpté de son effigie. Si la tombe a disparu, le gisant de bois subsiste : il est aujourd’hui conservé au musée de Saint-Brieuc.


L’abbaye entra dans un premier déclin spirituel avec l’instauration des abbés commendataires, principe entériné par le traité de Bologne, signé le 18 août 1516. Cette réforme modifia profondément les élections des maîtres abbés et les possessions attachées à leur statut seigneurial.
En 1522, Boquen fut secouée par un grave conflit lors de la succession du maître abbé défunt : deux moines se présentèrent pour lui succéder. Guillaume de Kersal et Jean de la Motte de Vauclerc furent à l’origine du trouble qui divisa la communauté en deux camps.
Jean de la Motte de Vauclerc, conseiller au Parlement et archidiacre de Nantes, déjà abbé de Ruis, fut finalement choisi par la majorité des moines. Il devint ainsi abbé de Boquen et mourut plus tard comme coadjuteur irrévocable de Quimper.

L’évêque de Nantes, Guillaume Éder de Beaumanoir, lui succéda comme abbé commendataire.
Par le principe même de la commende, un même abbé pouvait cumuler la possession de plusieurs abbayes, jouir de leurs revenus respectifs, tout en vivant à l’extérieur de ces monastères dont il était seigneur à part entière.
À l’image de ces abbés issus des grandes familles seigneuriales, Maurice de Commacre, abbé de Boquen, fut aussi abbé de Landévennec.
En 1558, l’abbaye de Boquen rapportait à elle seule un revenu annuel de 900 livres.
En 1698, l’abbaye exerçait encore un pouvoir étendu sur les ruisseaux et les forêts de Boquen.
Mais un siècle plus tard, vidée de sa sève spirituelle, elle ne comptait plus, à la veille de la Révolution, que quatre moines, abbé compris. Loin étaient les temps où ses revenus annuels atteignaient jusqu’à 1500 livres.
La Révolution allait bientôt pousser ses premiers cris, et le prieuré de la Magdeleine, au Pont de Dinan, allait lui aussi disparaître.
En 1936, l’abbaye de Boquen fut retrouvée en très grande ruine par Dom Alexis. Elle était alors envahie par une végétation dévorante.
Avec l’aide d’un seul fidèle, il entreprit de restaurer ce très vieux lieu saint, à la fois spirituellement et architecturalement. Les travaux durèrent jusqu’en 1965, année où l’abbaye fut de nouveau consacrée.
Finalement, il n’est pas de problème que la foi sincère ne puisse résoudre. Aujourd’hui encore, l’abbaye reste ouverte à la spiritualité, malgré le départ des Petites Sœurs de Bethléem.
Aidée par des laïcs, elle attend encore certains travaux de restauration, notamment ceux des verrières de la nef et des chapelles. La réfection de la couverture du cloître, vieilli comme les restaurations de Dom Alexis, est également envisagée.

Charte incomplète…Preuves Dom Morice colonne 519
Les prieuré et bourg de Jugon
L’Eglise Notre Dame de Jugon fut édifiée avec le bourg, vers 1110-1120, période approximative de la rédaction de cette charte ci-dessus montrée.
Construite devant le château, lequel élevait ses hauts murs au dessus d’un haut éperon, bâtisse défensive entourée par deux étendues d’eau situées toutes deux en contrebas, l’église et le bourg de Jugon apparaissent tous deux bien après d’édification du dit château de Jugon.
Ce castel fut peut-être édifié à la demande du premier seigneur de Penthièvre, à savoir par Eudes de Penthièvre ; comte de Bretagne Eudes était le propre frère puisné d’Alain III duc de Bretagne.
Lors de la veille de la fondation du prieuré voulue par Olivier II de Dinan, fils de Geoffroy 1er, petit-fils d’Olivier 1er, arrière-petit-fils de Goscelinus de Dinan, arrière-arrière-petit-fils de Roianteline vicomtesse de Dol, le prieuré et bourg de Jugon par définition étaient alors encore tous les deux inexistants.
Le château-fort de Jugon, hier édifié par les premiers seigneurs de Penthièvre, appartenait déjà à la famille seigneuriale de Dinan et cela depuis moult années .
Comment cette seigneurie, dite de Jugon, était t’elle devenue le bien propre de Geoffroy 1er de Dinan puisque ce seigneur, en la charte de fondation du dit prieuré, fut cité comme étant l’un des deux acteurs principaux et de l’édification de ce prieuré et de l’édification de son propre bourg ?
La charte de la fondation du dit prieuré de Jugon nous apprend que Geoffroy 1er entrera en la possession de ce castel par droits d’hérédité lui provenant de son père, le susdit Olivier 1er de Dinan.
Cette même acquisition se faisant par la seule voie de la transmission héréditaire,
Geoffroy étant le fils d’Olivier 1er de Dinan et de son épouse Ganna, un certain courant de pensée laisserait supposer que sa dite mère, Ganna, aurait pu être une enfant naturelle d’Eudes de Penthièvre.
Cette affiliation supposée pourrait ainsi expliquer comment la passation de la seigneurie de Jugon passa de la dite famille seigneuriale des Penthièvre à la dite famille des seigneurs de Dinan, via Olivier 1er .
La lecture de la charte de fondation du prieuré de Jugon nous apprendra qu’Olivier II de Dinan était « possesseur » de la place forte de Jugon par droits d’hérédité provenant de son père, le susdit Geoffroy 1er.
La charte de la fondation du prieuré de Jugon est très intéressante à étudier dans dans la mesure où elle nous montre le caractère belliqueux de Geoffroy 1er de Dinan ; il est vrai que celui-ci s’empara injustement, et cela avant la dite fondation du dit prieuré de Jugon, de tout un ensemble de terres ne lui appartenant aucunement. Ces terres spoliées par Geoffroy, assises au delà du château-fort de Jugon, étaient légalement le bien seigneurial de Brehant Vetulus, ou Brient dit le Vieux.
Brient fut ainsi l’une des toutes premières souches des seigneurs du Poudouvres.
La famille seigneuriale de Brehan, souche des seigneurs de Brehan-Loudeac en l’actuelle ancienne paroisse de Brehan, passe pour être l’une des plus anciennes maisons seigneuriales de Bretagne.
En la charte de fondation du prieuré de Jugon Guillaume de Brihan, dit « fils de Norman », est un parent proche de Brient Vetulus ou Brient le Vieux dit en latin Brientensium ce dernier étant, lui aussi, cité en cette charte.
Norman se dira être, dans la charte de la fondation du prieuré de Lambale, le fils de « Arnaud ».
Brientensium ou le dit Brient le Vieux prendra pour femme la sœur de Guildinus fils de Gilon.
Lire au bas de cette page le texte consacré à Brient Vetulus.
Charte « complète » relatant la fondation du prieuré de Jugon voulue vers 1109 par Geoffroy 1er de Dinan et Olivier II.
Notum sit presentibus et futuris quod Oliverius, prior filius Gaufredi domini Dinanensis, cum teneret ex hereditate a dono patris sui castrum quod vulgari lingua appellatur Jugon, ex nomine aque que fluit sub eodem castro, quod Jugon similiter appellatur, contigit ut aliquando cum eodem patre esset apud dictum Sanctum Maclovium de Insula, ubi concedenti ipso patro suo et Guillelmo cognomento Abbate fratre suo pro anima sua et parentum suorum. Deo et Beate Marie Majoris monasterii et monachis ejus, primo domum Guillelmin Abbati; deinde, super altare Sancti Maclovii, terram que est apud Jugon a magna porta, cum hospitibus qui jam erant in eadem terram, usque ad locum ubi conjungant due aque Jugon scilicet et Argolna, ad faciendam ecclesiam et burgum, ita solutum et quictum ut hospites ejusdem burgi, nec ipsi Oliverio nec alicui unquam reddant aliquam consuetudinem nisi monachis tantem. Promisit eciam se eis ad quietaturum quamdam curvaturam terre que propter reflexionem reflectitur et ipsa, versus burgum monachorum, ut possint cursum aque conjungue monti, sic et hospites ipsius Oliverii de vico qui est subtus castrum ex parte Argene fluvii aquararie usque ad magna portam; ad a magna porta usque ad burgum monachorum parrochiani ecclesie monachorum reddente ibi totum parochiale jus sicut et hospites eorum; dedit quoque eis eciam piscariam. Cujus donacionis testes sunt ex parte monachorum Guillelmus abba Sancti Martini, Guillelmus prior Minoris Monasterii, Guarinus de Lanrigan, Hubertus panetarius, Petrus bajulus; Gauterius armarius; Johannes de Combornio; Ravilius prior Sancti Maclovii; Mainfuntus prior Dinannensis; Guillelmus Rebrach; Golias sacristanus Sancti Maclovii; et famuli monachorus Pagnus camararius; Augerius de Hospitali; Johannes Marescalus; Gaufredus Resellus; Petrus Martinus; Rainaldus Columbel; Ascelinus Corbel; Radulfus Bruornus; porro ex parte Oliverii, ipse Goffredus pater ejus, et Guillelmus frater ipsius, Simon archidiaconus; Eudo Gobio; Herveus filius Hannonis; Paganus filius Kirkam; Hugo filius Guigonis; Brehaldus propositis et multi alii. Concessum et eciam ipso Oliverio ab abbate et monachis presentibus ut tantumdem fiat pro eo quando obierit quantum pro monacho. Porro in eadem septimana, venit Dominus Guillelmus abbas ad prefatum castrum ipsi Oliverii ubi ipse Oliverii addidit huic elemosine eciam molendinum unum suum cum tota piscaria ejus, dedit eciam et furnum, ad quem molendinum et furnum molerent et coquerent hospites de burgo suo a magna porta usque ad burgum monachorum per consuetudinem sicut et hospites eorum. Concessit eciam monachis quicquid eis dare vel vendere voluerunt homines ejus sive milites ita tamen ne perdat caput servicii sui. Concessit quoque ut monachis accipiant solute ac quiete de omnibus boscis ipsius ad edificandum et ardendum ubicunque ipse acceperit, ubicunque ejus acceperint homines ibi homines monachorum; porci vero monachorum sint in pasnagio in omnibus boscis suis sicut et porcis ejus erunt, et ubicunque pascent hospites ejus porcus suo. ibi et hospites monachorum similiter suo et monachis reddant pasnagium. Dedit eciam eis decimam de omnibus conductibus suis de passagio et concessit ut omnes hospites fuerint in terra monachorum quodcunque mercatum fecerint in castro ejus vel in quodcunque loco ipsius terre sive patris sui non reddant inde sibi consuetudines sed monachis. Si homines vero monachorum fecerint aliquid foris factum, clamor presens fiet ad monachum et faciet inde justiciam, et habebit emendationem qualem debebit si voluerit accipere aut, si voluerit, condonabit, quod si monachus a facienda justicia defecerit clamor deferetur ad dominum castri et ipse quidem coget hominem ad justiciam, sed monachus habebit emendacionem. Hec omnia concesserunt uxor ejus et filii Goffridus scilicet et Guillelmus. Hec omnia vidit et audivit Dominus Guillelmus abbas Sancti Martini cum omnibus monachis suprascriptis, demptis quatuor Guarino scilicet, Ravillio, Mainfunto; et famuli eciam suprascripti viderunt et audierunt exepto Urfredo. Ex parte vero Oliverii, ipse Oliverius, Bertrand filius de Magni, Galiurius filius de d’Eudes, Audroius filius Philippi, Roaldus filius Philippi, Gauffredus filius Gotonis, Galterius abbas, Guillelmus filius Norman de Brihan, Oliverius abbas, Trihan presbyter, Arnaldus Gremart, Simon archidiaconus, Eudo Goboi, Gualterius filius Mainfunti Isacar, Alanus miles, et Tanguy frater ejus, Morgant Cocus, Maurolegot, Radulfus portarius, Ricardus filius Maufredi, Gaufredus filius Pernaturalis, Gaufredus Manent, Gaufredus filius Pisci, Robertus Tonsus, Thomas de Sancto Joanne. Dedit quoque Bertrandus filius Magni, pro anima sua et parentum suorum Beato Martino et monachis ejus capellam quamdam que erat ex altera parte castri, ultra aquam, ubi aliquando interrabantur corpora mortuorum, (haec capella diruta est, nec vestigia manent) et quandam partem terre circa eandem cappellam ad hospitandum vel ad faciendum quod monachis placuerit (hac terrae particula non utitur prior); et sive hospites ibi mittant monachi, sine aliud quid faciant, totum erit solutum, et nichil omnino reddat nisi monachis. Et hoc ipse Oliverius concessit, et uxor ejus et filii supra nominati, et susceperunt societatem et beneficium Majoris Monasterii de manu prefati abbatis tam ipsa mater quam filius ejus; et Bertrannus et Trihan capellanus, et multi alii hec viderunt et audierunt supradicti testes pene tam monachi quam famuli quos quid supra nominati ad present eos reiterare necesse non suit. Cum Gaufredus, dominus Dinannensis, longo tempore dubitasset si posset dare an non in elemosinam aliquid de ecclesiis vel de decimis earum de feudo de Britennensium quod habebat in terra sua, et tollet eis per violencie rapinam, et nullum utile consilium invenisset sine assensu et voluntate illorum, quia dominus habebat odio rapinam, holocaustum et victime impiorum abominabiles sunt apud Dominum, Briencius, cognomine Vetulus, Britennensium summus domini, et eorum promogenitus, ac Sancti Maritini monachus, querens tam salutem animarum dinanensium dominorum quam parentum suorem, filiorum videlicet G. Vetuli et Gautherii Taschen, impetrato acceptoque ab omnibus illis assensu, impetrato acceptoque ab omnibus illis assensu, et voluntaria concessione ad Sanctum Maclovium Dinansem in claustrum venit cum Gilduim filio Gilonis cujus sororem uxorem habuerat, in quo claustro Gaufredum Dinanensem dominum cum monachis turbaque baronum suorum invenit, cui cum suorumque, assensum et voluntaria concessionem retulisset, Gaufredus valde gravisus est, concessio igitur talis sui : Ego Briencius Vetulus et filii mei, omnisque parentela nostra, volumus, assentimus, concedimus et rogamus ut de feudo nostro quod nobis, et omnes sciunt, injuste tollisti tam ex parentela tua Sancto Martino soli, et nullis aliis sanctis donatis in perpetuum habendum quicquid volueritis pro salute et redempcione animarum tocius generis nostri tam mortui quam viventis, ita ut elemosina in primis sit vestra et nos vobiscum ejusdem participes simus. Hac ergo donacione Gaufredus et filii sui accepta, donata et confirmata, gaudium magnum habuere ne amplius unde dubitaverunt dubitata vel debuerunt. Hujus convencionis testes ipse Gaufredus Dinanensis, Eudo Gobio, Morvanus Dumiaco, Pleardus de Brohorii , Radulphus filius Santarii, Ascelinus filius Briencii, Hustus grammaticus, David de Miniaco, Rainaldus filius Chinochi, Orricus de Miniaco, Querricus de Langanono, Testes de illa parte ispe Briencius Vetulus, Briencius Armarius, Gildunus filius Gilonis, Johannes sacrista, Rainaldus nepos ejus, Hamus capellanus monachorum, Brientius Cato et Rainaldus, Hanno filius Guerrici, Gaulterius de Mariaco, Robertus de Herico et alii multi. Mox Mox igitur en premiciis donorum donavit nobis decimam suam de Mignerito : hec facta sunt sub priore Mainfinito; ibidem domino militantibus monachis Herveo, Gingomaro, Hamarico, Rainaldo, Radulfo. Deinde dedit idem Gofredus, dominus Dinanensis, Sancto Martino et suis monachis, terram Berhandi Canuti, scilicet partem una de Carmalo, et alteram partem de Carmalou, quas partes concesserat idem Brehandus Canutus predicto Goffredo et eumdem suum heredem fecerant de illis partibus terre; has igitur duas partes terre de Carmalo et de Carmelen liberas dedit predictus Goffredus sicut dictum Beato Martino Majoris Monasterii concedentibus omnibus filiis suis;Testes hujus doni sunt ilii qui suprascripti sunt. Oliverius, Dinanensis dominus, dedit Domino et Sancto Martino et monachis de Jugon omnem consuetudinem hominum monachorum quam in feria sua accipiebat; unde testes Ricardus dapifer, Rivalonius portarius, Perenesus de Porta et alii multi. Notum sit omnibus fidelibus presentibus et qui post ipsos futuris sunt quia Evanus filius Ranulfi, inspirante Domino, volens fieri monachus in monasterio Beati Martini Majoris Monasterii, paulo antequam fuerat monachis, dedit Sancto Martino et suis monachis heriditatem suam de terra que vocatur Carmoith, sicut eandem tenuerat, jure hereditario, Ranulfus pater suus. Hoc donum fuit factum et confirmatum ante Gaufredum dominum Dinanensem. Ex sua parte vero idem, dinanensis dominus, dedit Beato Martino et suis monachis totum servicium quod habebat in predicta terra Ranulfi Carmoith quam post Ranulfum tenebant Galterius et Evanus filii sui et Verserius consanguineus eorum.Testes ex parte eorum ipse Goffredus dominus, Evarius Cocu, Robertus Bernardi filius, Moyses Gormeli filius, Gormelon Rufus, ex parte monachorum dominus abbas Guillelmus, Durandus, Asinus, Evanus Ranulfi filius. Et quoniam castrum de Jugon, antequam in dominium Gauffredi Dinanensis vel heredum ejus deveniret, antecessorum et parentum comitis Stephani fuisse dignoscitur, quadam vice, dum idem comes Stephanus de curia regis Anglorum veniens per Jugon transiret, dominus Gauffredus de Ivran et dominus David, monachi scillicet de Jugon, adierunt comitem Stephanum, multis precibus eum rogantes ut elemosinam de Jugon quam Gauffredus Dinanensis et Oliverius filius ejus Majori Monasterio fecerant ipse concederet; quod tunc in audiencia multorum benigne concessit. Horum scilicet presencia Conani capellani ipsius comitis, Horvenesii filius Horvenesii, Goscelini de Riviler, Roaldi vicarii, Goffredi filii Pissonisi; de parte monachorum interfuerunt Gauffredus de Ivran et David socius ejus et David capellanus monachorum, Hoellus famulus monachorum et alii multi. Galterius de Bocoit et Rivalonus fratre ejus dederunt monachis Sancti Martini Majoris Monasterii apud Jugon manentibus ut eorum firmitatem habere promererentur duo novalia prati; duoque arabilis terra in Carboihac, unde testes sunt ex parte monachorum Radulphus prior, Evanus monachus, David presbiter, Gorhandus Sebelinus; d’autre part Galterii ipse et frater ejus Gaufredus Rivallonis filius, Gaufredus Gualterini filius, Carnotus Tarduvinus et alii multi. Postea vero ipse Rivallonus decidens ininfirmitatem dedit Deo et et monachis pro amina sua quatuor novalia terre et omnia alia prata, terra arabiles juxta petram propinquam Maelariam, et juxta petram Merclariam et duo prati. Unde sunt testes supradicti. Eo itaque tempore quo dedit dominus Oliverius de Jugon, pro anima sua et parentum suorem, Domino et Sancto Martino in manus Guillelmi abbatis, donum quod huc usque ipsius ac suorum omnium patrocinio filiorum ratum tenemus eodem, sicut in presenti cartula alias scriptum habemus, alias scriptum habemus, Bertrannus Magny filius pro anima sua capellam Beate Marie et curam eadem, et quodam terre novale et cemiteriolum ubi peregrinorum et pauperum corpora inhumari solebant eidem abbati et monachis suis donavit. Postea vero, defuncto primogenito suo, ut supradicti monachi in oracionibus suis eum susciperint, donum illud augmentaturum pollicebatur. Deinde, divina inspirante gracia, qua dicitur : virtus infirmitate perficitur, non modica correctus infirmitate, quasi fratre suos monachos advocat, consilium querit, et se ipsum eis tribuens, et ut eum in oracionibus suis susciperent censum duorum solidorum et unius quarterii frumenti eis donavit; et ne qui eis quasi monachis fraudulenter contradiceret; Gaufredum Oliverii filium et fratres suo qui testes ac doni hujus defensores essent advocatit homines qui censum redderent; preostendit Tehellum videlicet Vetulum unam minam frumenti et sex solidos a terra quam ab eo tenebat sibi reddentem; Bernardumque Cabalum unam minam frumenti reddentem, Exulatumque Petri filium tres solidos; Gravonis filium duodecim dinarios; presentes hujus doni testes sunt Radulfus prior, Herveus et Evanus monachi, Hamo capellanus, David presbiter, Evanus sacerdos, Goffredus, Alanus [et] Oliverius fratres et dominus hujus castri, Picardus dapifer, Hanno Gorra et Robertus fratre ejus, Oliverius de Leen, Exulatus de Guerrivel, Hoel, Gonnor uxor Oliverii, Alanus Bertranni filius, Stephania ejusdem uxor Bertranni, Laura Bertranni filia, qui et ipsi pro anima domino et monachis hec dona dederunt et concesserunt. Ne posterita veteres latere queat, stylo memoricque, quod Goffredus de Corrun in claustro Sancti Maclovii de Dinan, abbati Guillelmo et monachis ejus, dedit partem suam cujusdam molendini de Stagno, quartem partes omnium consuetudinum quas tunc hereditario jure possedebat, et de passagio decimam sur partis de passagii. Hujus rei testes sunt ipse Gauffredus de Dinan et Olivierusque ejus filius, et Alanus et Evanus Cocus, David de Miniac et multi alii. Ut Rafredus molendinarius particeps beneficii Majoris Monasterii esset, de horto suo concessit terram habendam ad exclusam reficiendam, quapropter monachi et eorum capellanus injunxerunt et honorifice sepelierunt . Quod ejus filii Herveus et Galterius concesserunt et super altare Sancto Marie posuerunt. Hujus doni testes existunt Evanus, magister Jullianus capellanus, Evanus Tardif, Alanus filius Arnaudi. Sic sigillatum in sermento albo cum filiis ab ipso impendentibus.
Traduction personnelle : Elios.
Qu’il soit connu des présents et des futurs qu’Olivier, prieur, fils de Geoffroy, seigneur de Dinan, alors qu’il détenait par héritage le château nommé dans la langue vulgaire Jugon, tirant son nom de la rivière qui coule sous ledit château et qui se nomme également Jugon, se trouvait un jour avec son père au lieu dit Saint-Malo-de-l’Île. Là, avec le consentement de son père et de son frère Guillaume, appelé l’Abbé, il fit une donation pour le salut de son âme et de celles de ses parents à Dieu, à la Bienheureuse Marie du monastère de Marmoutier, et à ses moines.
Il donna d’abord une maison à l’abbé Guillaume, puis, sur l’autel de Saint-Malo, une terre située à Jugon depuis la grande porte avec les habitants déjà installés, jusqu’au point où se rejoignent les deux rivières, la Jugon et l’Argolna, afin d’y construire une église et un bourg. Cette terre est donnée librement et en toute quiétude, de sorte que les habitants du bourg ne paieront jamais aucune redevance ni à Olivier ni à personne d’autre, sinon aux moines seuls.
Il promit également de leur céder une courbure de terre détournée par le cours d’eau vers le bourg des moines, afin de permettre la jonction des eaux. De même, les habitants du village en dessous du château, du côté de la rivière d’Argolna jusqu’à la grande porte, et de là jusqu’au bourg des moines, seront les paroissiens de l’église des moines et leur verseront intégralement les droits paroissiaux comme leurs propres habitants. Il leur donna aussi la pêcherie.
Les témoins de cette donation, du côté des moines : Guillaume, abbé de Saint-Martin ; Guillaume, prieur du Minimus Monasterium ; Guarin de Lanrigan ; Hubert le panetier ; Pierre le bailli ; Gautier l’armurier ; Jean de Comborn ; Ravil, prieur de Saint-Malo ; Mainfunt, prieur de Dinan ; Guillaume Rebrach ; Golias, sacristain de Saint-Malo ; les serviteurs des moines : Pagnus le chambellan ; Auger de l’Hôpital ; Jean le maréchal ; Geoffroy Resellus ; Pierre Martin ; Renaud Colombel ; Ascelin Corbel ; Raoul Bruorn.
Du côté d’Olivier : son père Geoffroy ; son frère Guillaume ; Simon, archidiacre ; Eudes Gobio ; Hervé, fils de Hamon ; Payen, fils de Kirkam ; Hugues, fils de Guigon ; Bréhal, prévôt, et beaucoup d’autres.
Il fut également concédé par l’abbé et les moines qu’au moment de sa mort, il soit traité comme l’un des leurs.
Dans la même semaine, l’abbé Guillaume vint au château d’Olivier. Ce dernier ajouta à son aumône un de ses moulins avec toute sa pêcherie, et un four, où les habitants de son bourg, de la grande porte jusqu’au bourg des moines, viendraient moudre et cuire, selon la coutume, comme leurs habitants.
Il accorda aussi aux moines le droit de recevoir gratuitement du bois dans ses forêts pour construire et se chauffer, là où ses propres gens pourraient en prendre ; les porcs des moines pourront paître dans toutes ses forêts comme les siens, et là où ses hommes mènent leurs porcs, ceux des moines iront aussi, rendant aux moines le droit de glandée.
Il leur donna encore la dîme de tous ses droits de passage, et il concéda que tous les habitants qui seraient sur la terre des moines, quels que soient les marchés qu’ils tiendraient dans son château ou ailleurs sur ses terres ou celles de son père, n’en verseraient les redevances qu’aux moines.
Si un homme des moines commettait une faute, le recours irait au moine qui rendrait justice ou accorderait remise ; si le moine refusait d’agir, l’affaire serait portée devant le seigneur du château, qui obligerait à rendre justice, mais le moine conserverait l’amende.
Tout cela fut confirmé par son épouse et ses fils, Geoffroy et Guillaume.
Tout cela fut vu et entendu par Guillaume, abbé de Saint-Martin, avec tous les moines susmentionnés sauf quatre : Guarin, Ravil, Mainfunt ; les serviteurs également, sauf Urfroi.
Du côté d’Olivier : Olivier lui-même ; Bertrand, fils de Magni ; Galiurius, fils d’Eudes ; Audroi, fils de Philippe ; Roald, fils de Philippe ; Geoffroy, fils de Goton ; Gautier, abbé ; Guillaume, fils de Norman de Brihan ; Olivier, abbé ; Trihan, prêtre ; Arnaud Gremart ; Simon, archidiacre ; Eudes Gobio ; Gautier, fils de Mainfunt Isacar ; Alain, chevalier, et Tanguy son frère ; Morgant le cuisinier ; Maurolegot ; Raoul le portier ; Richard, fils de Manfroi ; Geoffroy, fils de Pernatural ; Geoffroy Manent ; Geoffroy, fils de Pisci ; Robert Tonsus ; Thomas de Saint-Jean.
Bertrand, fils de Magni, pour le salut de son âme et de ses parents, donna à Saint-Martin et à ses moines une chapelle de l’autre côté du château, au-delà de l’eau, où l’on enterrait autrefois les morts (la chapelle est aujourd’hui détruite, sans vestiges), et un terrain autour pour loger ou faire ce que les moines jugeraient bon (ce terrain n’est pas utilisé actuellement par le prieur). Si les moines y placent des hôtes ou font autre chose, ce sera libre de tout sauf envers les moines.
Cela fut confirmé par Olivier, son épouse et ses fils susnommés. Tous acceptèrent la société et les bienfaits de Marmoutier de la main de l’abbé, tant la mère que le fils ; Bertrand, Trihan le chapelain et beaucoup d’autres en furent témoins, moines et serviteurs susnommés.
Alors que Geoffroy, seigneur de Dinan, hésitait depuis longtemps à savoir s’il pouvait ou non donner en aumône quelque chose des églises ou des dîmes issues du fief des Britanniens qu’il détenait sur ses terres — et qu’il avait prises par violence — sans leur accord et volonté, car il détestait le vol et savait que « les offrandes et les sacrifices des impies sont en abomination devant Dieu »…
Brient, surnommé Vetulus, chef des Britanniens et leur aîné, devenu moine de Saint-Martin, soucieux du salut des âmes des seigneurs de Dinan et de ses propres parents (notamment les fils de G. Vetulus et Gautier Taschen), ayant obtenu l’accord de tous, se rendit au cloître de Saint-Malo de Dinan avec Gilduin, fils de Gilon dont il avait épousé la sœur.
Ils y trouvèrent Geoffroy, seigneur de Dinan, entouré de ses moines et d’une foule de ses barons. Ayant rapporté l’accord général, Geoffroy s’en réjouit grandement. La concession fut alors la suivante :
« Moi, Brient Vetulus, avec mes fils et toute notre parenté, nous voulons, nous acceptons, nous concédons et nous prions que, de notre fief, qui nous fut injustement enlevé, comme chacun le sait, tu donnes à Saint-Martin seul — et à aucun autre saint — tout ce que tu voudras, pour le salut et la rédemption des âmes de toute notre lignée, vivante et défunte. Que cette aumône soit d’abord la vôtre, et que nous en soyons, avec vous, les co-participants. »
Ce don fut accepté, donné et confirmé par Geoffroy et ses fils. Une grande joie s’ensuivit, car ce qui faisait doute ne l’était plus.
Du côté de Geoffroy : lui-même ; Eudes Gobio ; Morvan de Dumiac ; Pleard de Brohorii ; Raoul fils de Santarius ; Ascelin fils de Brient ; Hustus le grammairien ; David de Miniac ; Renaud fils de Chinoch ; Orric de Miniac ; Querric de Langanon.
Du côté de Brient Vetulus : lui-même ; Brient l’armurier ; Gilduin fils de Gilon ; Jean le sacristain ; Renaud son neveu ; Hamo chapelain des moines ; Brient Cato ; Renaud ; Hanno fils de Guerric ; Gautier de Mariac ; Robert de Heric et beaucoup d’autres.
Peu après, dès les premiers dons, il nous donna sa dîme de Migneret. Ces faits se déroulèrent sous le priorat de Mainfunt, alors que les moines Herveus, Gingomarus, Hamaricus, Rainaldus et Radulphus servaient encore dans ce monastère.
Ensuite, ce même Geoffroy, seigneur de Dinan, donna à Saint-Martin et à ses moines la terre de Berhand Canut, à savoir une moitié de Carmalo et l’autre moitié de Carmalou. Ces parcelles avaient été cédées à Geoffroy par Berhand Canut lui-même, qui l’avait désigné comme son héritier. Ainsi, Geoffroy donna librement ces deux moitiés de terre à Saint-Martin de Marmoutier, avec l’accord de tous ses fils. Témoins de ce don : ceux mentionnés précédemment.
Olivier, seigneur de Dinan, donna à Dieu, à Saint-Martin et aux moines de Jugon toutes les redevances qu’il percevait sur les gens des moines lors de sa foire. Témoins : Richard le sénéchal, Rivalon le portier, Perenes de Porta et beaucoup d’autres.
Qu’il soit connu de tous les fidèles présents et futurs qu’Evan, fils de Ranulfus, inspiré par le Seigneur et désireux de devenir moine au monastère de Saint-Martin de Marmoutier, donna juste avant son entrée en religion à Saint-Martin et à ses moines son héritage sur la terre nommée Carmoith, que son père Ranulfus tenait en droit héréditaire.
Ce don fut fait et confirmé en présence de Geoffroy, seigneur de Dinan. En retour, ce dernier donna à Saint-Martin et à ses moines tous les services qu’il percevait sur cette terre de Carmoith, services qui étaient alors rendus par Galterius et Evanus, fils de Ranulfus, ainsi que par Verserius, leur cousin. Témoins de ce don : Geoffroy lui-même, Evarius Cocu, Robert fils de Bernard, Moyses fils de Gormel, Gormelon le Roux, et du côté des moines : l’abbé Guillaume, Durandus, Asinus, Evanus fils de Ranulfus.
Comme le château de Jugon appartenait aux ancêtres et aux parents du comte Étienne avant d’entrer dans la seigneurie de Geoffroy de Dinan ou de ses héritiers, un jour, alors que le comte Étienne revenait de la cour du roi d’Angleterre et traversait Jugon, messires Geoffroy de Ivran et David, moines de Jugon, le supplièrent de confirmer l’aumône faite à Marmoutier par Geoffroy de Dinan et son fils Olivier. Ce qu’il fit favorablement devant de nombreux témoins.
Présents : Conan, chapelain du comte ; Horvenesius, fils de Horvenesius ; Goscelin de Riviler ; Roald le vicaire ; Geoffroy fils de Pissonis. Côté moines : Geoffroy d’Ivran, David son compagnon, David chapelain des moines, Hoël serviteur des moines et beaucoup d’autres.
Gautier de Bocoit et son frère Rivalon donnèrent aux moines de Marmoutier résidant à Jugon deux prairies en jachère, ainsi que deux terres arables à Carboihac, en vue d’obtenir leur soutien.
Témoins, côté moines : Raoul le prieur, Evanus moine, David prêtre, Gorhan de Sebelin. Côté donateurs : Gautier et son frère Geoffroy, fils de Rivallon ; Geoffroy, fils de Gautierin ; Carnotus Tarduvin et bien d’autres.
Plus tard, Rivalon, tombé malade, donna à Dieu et aux moines, pour le salut de son âme, quatre prairies nouvelles, tous les autres prés et terres arables proches des pierres appelées Maelaria et Merclaria.
Au moment où Olivier de Jugon donna, pour le salut de son âme et de ses parents, son don entre les mains de l’abbé Guillaume, ce don fut confirmé par ses fils. Bertrand, fils de Magni, donna alors, pour le salut de son âme, la chapelle de Sainte-Marie, ses dépendances, une terre nouvelle et un cimetière où l’on enterrait les pèlerins et les pauvres.
Après la mort de son fils aîné, il promit d’augmenter ce don, demandant aux moines de prier pour lui. Touché par la grâce divine — « car la vertu s’accomplit dans la faiblesse » —, il consulta les moines, se donna entièrement à eux, leur remit un cens de deux sous et un quart de blé.
Pour éviter tout litige futur, il appela ses fils Gaufred et ses frères pour défendre ce don, et fit comparaître les hommes concernés : Tehellus Vetulus, qui lui devait un minot de blé et six sous ; Bernardus Caballus, un minot de blé ; Exulatus, fils de Pierre, trois sous ; le fils de Gravo, douze deniers.
Témoins de ce don : Raoul le prieur ; Herveus et Evanus, moines ; Hamo chapelain ; David prêtre ; Evanus prêtre ; Goffredus, Alanus et Oliverius, frères et seigneurs du château ; Picard, sénéchal ; Hanno Gorra et Robert son frère ; Olivier de Leen ; Exulatus de Guerrivel ; Hoël ; Gonnor, épouse d’Olivier ; Alan, fils de Bertrand ; Stéphanie, épouse de Bertrand ; Laura, fille de Bertrand.
Ils firent tous don et concession pour le salut de l’âme du seigneur et au bénéfice des moines.
Enfin, afin que la postérité ne soit pas ignorante du passé, qu’il soit consigné que Geoffroy de Corrun, au cloître de Saint-Malo de Dinan, donna à l’abbé Guillaume et à ses moines sa part du moulin de l’Étang, à savoir un quart de toutes les coutumes qu’il possédait alors par héritage, et la dîme de sa part du droit de passage.
Témoins : Geoffroy de Dinan lui-même, Olivier son fils, Alain et Evanus Cocus, David de Miniac et beaucoup d’autres.
Rafred le meunier, pour faire partie des bienfaiteurs de Marmoutier, donna une portion de son jardin pour permettre la réparation de l’écluse. Pour cela, les moines et leur chapelain l’ensevelirent avec honneur.
Ses fils Herveus et Gautier confirmèrent ce don et le déposèrent sur l’autel de Sainte-Marie.
Témoins : Evanus ; maître Julien, chapelain ; Evanus Tardif ; Alain, fils d’Arnaut.
Le tout fut scellé d’un sceau blanc en présence de ses fils.
Ascelin Corbel : serviteur des moines, témoin silencieux d’une partie des actes.
🛡️ Serviteurs monastiques.
Olivier : prieur et fils de Geoffroy, seigneur de Dinan. Il est le donateur principal de la charte, à l’origine de l’aumône aux moines de Marmoutier.
🛡️Famille de Dinan.
Geoffroy : seigneur de Dinan, père d’Olivier. Il co-signe les donations et intervient dans les accords fonciers avec les Britanniens.
🛡️Famille de Dinan.
Guillaume : abbé de Saint-Martin. Il est le principal récepteur des donations et le garant spirituel de la fondation.
🛡️Moines de Marmoutier.
Guillaume (frère d’Olivier) : appelé l’Abbé. Il est le frère d’Olivier et donne son consentement aux dons réalisés.
🛡️Famille de Dinan.
Brient Vetulus : chef des Britanniens, ancien détenteur légitime de certains fiefs, moine de Saint-Martin. Il joue un rôle décisif dans la résolution du litige territorial avec Geoffroy.
🛡️Britanniens / Acteurs civils.
Simon : archidiacre, représentant du clergé, témoin important lors des confirmations.
🛡️Clergé.
Eudes Gobio : témoin régulier et conseiller probable, il apparaît à plusieurs moments dans la charte comme garant ou observateur.
🛡️Tiers pouvoir laïc / Allié seigneurial.
Main : prieur de Dinan, régulièrement cité dans les actes, fidèle relais monastique.
🛡️Moines de Marmoutier.
Guarin de Lanrigan : moine ou vassal, témoin parmi les religieux.
🛡️Moines de Marmoutier.
Jean de Comborn : témoin laïc, cité au nom des intérêts monastiques.
🛡️Moines de Marmoutier.
Payen le chambellan : serviteur des moines, il participe aux procédures et à la confirmation des dons.
🛡️Serviteurs monastiques.
Pierre le bailli : officier judiciaire, garant des transactions, il veille à la légalité des cessions.
🛡️Autorité civile.
Bertrand, fils de Magni : donateur secondaire, il offre une chapelle et des terres, touché par la mort de son fils.
🛡️Famille noble alliée.
Stéphanie : épouse de Bertrand, elle confirme et accompagne les aumônes de son mari.
🛡️Famille noble alliée.
Gonnor : épouse d’Olivier, elle valide les donations de son mari, présente dans plusieurs confirmations.
🛡️Famille de Dinan.
Geoffroy Manent : témoin noble, rattaché à la maison de Dinan, présent lors des accords avec les Britanniens.
🛡️Famille de Dinan / Allié.
Gilduin : fils de Gilon, beau-frère de Brient Vetulus. Il l’accompagne dans le règlement final avec Geoffroy.
🛡️Britanniens / Allié de Brient.
Renaud Colombel : serviteur monastique, clerc ou notaire probable, assistant lors des décisions.
🛡️Serviteurs monastiques.
Hubert le panetier : serviteur chargé du pain, présent parmi les témoins monastiques.
🛡️Serviteurs monastiques.
Pierre le bailli : agent d’autorité civile, présent dans les validations.
🛡️Autorité judiciaire.
Gautier l’armurier : artisan armurier, témoin en faveur des moines.
🛡️Moines de Marmoutier.
Ravil, prieur de Saint-Malo : figure religieuse locale, témoin dans la donation initiale.
🛡️Clergé local affilié.
Golias, sacristain de Saint-Malo : chargé des objets liturgiques, témoin religieux.
🛡️Clergé.
Jean le maréchal : serviteur attaché aux chevaux, témoin dans l’entourage monastique.
🛡️Serviteurs monastiques.
Geoffroy Resellus : serviteur laïc, rôle administratif probable.
🛡️Serviteurs monastiques.
Pierre Martin, Raoul Bruorn, Auger de l’Hôpital, Renaud Colombel, Ascelin Corbel : serviteurs ou membres du personnel des moines, souvent listés ensemble.
🛡️Serviteurs monastiques.
Hervé, fils de Hamon : témoin du camp d’Olivier, probablement vassal.
🛡️Famille de Dinan – entourage militaire.
Payen, fils de Kirkam, Hugues, fils de Guigon : témoins laïcs associés à Olivier.
🛡️Famille de Dinan / Tiers vassalité.
Bréhal, prévôt : fonctionnaire civil de haut rang, témoin direct des accords.
🛡️Autorité seigneuriale.
Gautier, abbé, Olivier, abbé, Trihan, prêtre : figures religieuses présentes lors des extensions de dons.
🛡️Clergé – soutiens institutionnels.
Arnaud Gremart, Roald, Richard fils de Manfroi, Geoffroy fils de Goton, Geoffroy fils de Pernatural, Geoffroy fils de Pisci : témoins nobles et vassaux rattachés à la maison de Dinan.
🛡️Famille de Dinan / Alliés.
Robert Tonsus, Thomas de Saint-Jean, Alain, chevalier, Tanguy son frère, Maurolegot, Raoul le portier : figures laïques secondaires mais présentes lors des validations.
🛡️Maison de Dinan / Soutiens civils et militaires.
Brient l’armurier, Brient Cato, Jean le sacristain, Renaud (neveu), Hanno fils de Guerric, Gautier de Mariac, Robert de Heric : entourage de Brient Vetulus, présents lors de la réconciliation finale.
🛡️Britanniens / Allié de Brient.
Hamo, chapelain des moines : figure clé dans l’administration religieuse.
🛡️Moines de Marmoutier.
David de Miniac, Orric de Miniac, Morvan de Miniac, Pleard de Brohorii, Raoul fils de Santarius, Renaud fils de Chinoch : barons locaux, témoins de Geoffroy dans la validation finale.
🛡️Alliés de Geoffroy.
Evan, fils de Ranulfus : donne sa terre de Carmoith avant d’entrer en religion.
🛡️Donateur isolé.
Galtherius, Verserius, Evarius Cocu, Robert fils de Bernard, Moyses fils de Gormel, Gormelon le Roux : témoins de la donation de Carmoith.
🛡️Alliés civils / témoins neutres.
Comte Étienne : seigneur supérieur qui confirme la donation des Dinan.
🛡️Pouvoir comtal.
Gautier de Bocoit, Rivalon, Geoffroy fils de Rivallon, Geoffroy fils de Gautierin, Carnotus Tarduvin : nobles donateurs de prairies, en soutien aux moines.
🛡️Familles locales alliées à Marmoutier.
Tehellus Vetulus, Bernardus Caballus, Exulatus fils de Pierre, Fils de Gravo : hommes redevables, cités lors de la régularisation finale.
🛡️Redevables / Tenanciers.
Picard, sénéchal, Hanno Gorra, Robert son frère, Olivier de Leen, Exulatus de Guerrivel, Hoël : personnages impliqués dans la défense ou la reconnaissance des dons.
🛡️Vassaux et protecteurs de la cause monastique.
Laura, fille de Bertrand, Stéphanie, Gonnor, Alan fils de Bertrand : membres féminins et descendants qui confirment les dons.
🛡️Familles alliées

Jugon et le Poudouvre : le choc des héritages
Avant que le nom de Dinan ne s’impose comme une forteresse, le Poudouvre était déjà une terre disputée, chargée d’histoire, portée par deux mémoires rivales. La charte de fondation du prieuré de Jugon, document essentiel à notre propos, met en scène un litige foncier entre :
– Geoffroy Iᵉʳ de Dinan, arrière-petit-fils de Roianteline, héritier direct d’un pouvoir féodal structurant et effectif.
– Brient Vetulus, son cousin éloigné, figure noble, se présentant non comme simple voisin, mais comme descendant d’un « comte du Poudouvre ».
Longtemps, on a cru que cette revendication rattachait Brient à Eudes de Penthièvre, en raison d’un faisceau onomastique et territorial. Mais ce rattachement, en apparence logique, effaçait un élément essentiel : le caractère familial du litige. Car si Brient avait été un petit-fils d’Eudes, il n’aurait pas revendiqué un héritage comtal ancien sur le Poudouvre, mais bien les possessions du Penthièvre elles-mêmes.
Or, tout laisse à penser aujourd’hui que Brient Vetulus est l’arrière-arrière-petit-fils du tout premier vicomte du Poudouvre : Hamon le Vicomte, tombé à Conquereuil en 992. Celui-ci aurait eu deux fils : l’un, Hamon Magister, époux de Roianteline, fondateur de la seigneurie de Dinan ; l’autre, ancêtre direct de Brient Vetulus, à l’origine d’une branche restée dans l’ombre.
Ainsi, à la fin du Xe siècle, le Poudouvre aurait été divisé entre deux lignées :
– celle de Dinan, par Hamon Magister et ses descendants ;
– celle de Brient, qui conservait la mémoire d’une autorité seigneuriale ancienne sur le sud du territoire.
Le surnom Vetulus (« le Vieux ») atteste que Brient était né vers 1050–1060, contemporain de Geoffroy Iᵉʳ de Dinan, voire d’Olivier II. Il n’était donc ni un rival archaïque, ni un prétendant isolé, mais bien un égal en lignage comme en droit.

La Maison seigneuriale de Brient dit Vetulus
La maison seigneuriale de Bréhan est l’une des plus anciennes de Bretagne ; elle est issue de la terre et seigneurie de Bréhan-Loudéac, apparaissant dans l’un des cartulaires de l’abbaye de Marmoutier dès l’année 1080.
La terre seigneuriale de Bréhan-Loudéac était, à l’orient, délimitée par celle du Porhoët, cette dernière étant elle-même bornée à l’est par le comté de Rennes. Le vicomte Eudes, possesseur de Chavagne au sud-ouest de Rennes et époux de Roianteline, fut seigneur du Porhoët et vicomte de Rennes. Sans enfant pour lui succéder, il choisit Geoffroy Iᵉʳ, duc de Bretagne, comme unique héritier, lui offrant avant de mourir ledit Chavagne.
Chef de la maison des Brient, le seigneur Bréhan le Vieux — Brient Vetulus — apparaît dans les chartes par le don de certains fiefs qu’il possédait et qu’il remit à l’abbaye de Marmoutier ou monastère de Saint-Martin-le-Grand : Brientensius Summus Dominus et eorum primogenitus…
D’après cet acte, il avait épousé la sœur du seigneur Gilduin (filius Gilon). Il signe ce même acte aux côtés de ses propres enfants, Guillaume et Gautier. Bréhan le Vieux figure aussi dans d’autres chartes relatives à des dons, tant à Marmoutier qu’à l’abbaye de Saint-Melaine de Rennes. Il apparaît encore le 14 juillet 1121 dans une charte concernant un don de Geoffroy II, comte de Bretagne, au prieuré de Saint-Martin de Lamballe, prieuré fondé par Geoffroy Iᵉʳ Boterel en 1083.
Peu après, Geoffroy Iᵉʳ de Dinan entra en conflit ouvert avec le haut seigneur Bréhan le Vieux et ses fils aînés — cités dans la charte susdite — en les spoliant sans concertation de certaines de leurs terres situées au-delà de la seigneurie de Jugon-Dinan.
Dans la continuité de la fondation du prieuré de Jugon, et des dons régulièrement faits à ce même prieuré, Geoffroy de Dinan hésita en effet à offrir au monastère de Jugon les dîmes issues directement de ces terres spoliées — terres qui, en toute légitimité, appartenaient à Brient Vetulus et à ses fils aînés. Brient et ses enfants saisirent ce problème « moral » pour faire appel au grand monastère de Saint-Martin, demandant que, pour le salut de leurs âmes, de celles de Geoffroy de Dinan et de sa famille, toutes les approbations et concessions volontaires de dîmes soient désormais placées sous l’autorité de Marmoutier. Ces dîmes provenaient des fruits mêmes de leurs terres spoliées par Geoffroy.
À cette demande, Guillaume Vetulus et Gautier, dit aussi Taschae, obtinrent satisfaction

Quelques informations sur certains des témoins
Ce jugement fait « aimablement » fut rendu en le cloitre de l’église de Saint-Malo de Dinan et cela en présence de Gildiun fils de Gilonis dont Brient Vetulus ou Brehant le Vieux avait épousé la sœur.
En ce même cloitre, entouré des moines et d’une foule de grand barons présents, Geoffroy acquiesça à la requête émise par la famille Vetulus ; devant cet accord conclu Geoffroy de Dinan semble avoir exprimé une joie sincère et furent ainsi témoins de ce même accord Bréhant le Vieux et ses enfants.
Furent témoins de ce jugement Eudes Gobio (Eudes Gouyon) celui-là même qui fut, hier, présent lors de la fondation et du prieuré et du Bourg de Jugon.
Seront témoins en autre : Morvan filius Miniac, premier seigneur de la paroisse de Miniac-Morvan ; Pleardus de Broon (Pierre de Broons) lequel fut peut-être le tout premier seigneur de cette terre qui verra naitre le futur connétable Bertrand Du Guesclin. Citée dès le début du 12ème siècle, aux côtés de la puissance seigneuriale des seigneurs de Dinan, la seigneurie de Broons passe pour être l’une des plus ancienne maison de Bretagne. L’église de Broons est toujours aujourd’hui placée sous le vocable de Pierre.Seront également témoins lors de ce même jugement Raoul fils de Santarii, Ascolin fils de Brient, Herbert grammatical, David de Miniac, Rainald fils de Chimoici, Orricis de Miniac, Guerin de Langan (Guerricus ou Jacques de Languenon, premier seigneur connu de la ville actuelle de Languenan laquelle est née d’un démembrement réalisé au sein des paroisses de Corseul et de Ploubalay. Les dîmes de Languenan seront citées dès 1235 et en 1278 lors d’un accord établit entre Alain de Gouyon, seigneur de Matignon, et l’abbaye de Saint-Aubin des Bois).
Du côté de Brehant (Brient) Vetulus furent témoins : Brient, Armarius, Gildguinus fils de Gilonis ; Haimon Capellan (de la Chapelle) moine ; Brient Cato (Brient le Chat) ; Rainaldus ; Haimon fils de Guerrici (Guerin); Gaultier de Meciaco ; Robert de Hihenico et plusieurs autres.
Ceci fut fait aussi en présence du Prieur Malfinito. Puis Gaudefroy de Saint-Martin et le moine de son pays l’accompagnant, Berhaudi Canuti, donnèrent à leurs tours une partie des terres de Carmalo.
Geoffroy de Dinan et son fils, le même Olivier, reconnaissant aussitôt que ces mêmes terres avaient été offertes par le dit Berhaudus Canutus (le Blanc).
A ce dernier don furent témoins les mêmes personnages déjà cités ci-dessus.
Puis Olivier de Dinan donna en dernier à Dieu, à Saint-Martin et aux moines de Saint-Martin officiant à Jugon toutes les dîmes perçues habituellement le jour de la Foire au nouveau bourg de Jugon. Furent témoins de cette décision d’Olivier II de Dinan, Richard Dapifer son sénéchal, Rivallon le portier, Perenesius de Porta (probablement issu de la paroisse ancienne de la Prenessaye laquelle, orthographiquement, vient de Perennes et Perenesius; paroisse alors située au plus près de la forêt de Loudéac et positionnée au plus près du fief de Brient Vetulus) et plusieurs autres aussi.
Brient Vetelus semble avoir eu pour fils le tout dernier seigneur « vicomte du Poudouvre », Alain Brient (Alain fils de Brient) vicomte du Poudouvre.
D’ailleurs, au lendemain même de cette dispute, Geoffroy II de Dinan, fils du dit Olivier II, prendra pour épouse Muriel du Poudouvre fille d’Alain Brient et de Muriel, tous deux vicomte et vicomtesse du Poudouvre . Cette union mettra sur la même ligne générationnelle et le dit Alain Brient et les susdits enfants de Brient Vetulus. D’ailleurs, en une charte de l’abbaye de Saint-Aubin des Bois, Alain Brient, époux de Muriel, se dira être le descendant des Vicomtes du Poudouvre cette seigneurie étirant, hier, ses terres entre l’Arguenon et la Rance.
Et par le mariage de la dite Muriel, écrit aussi Muliel, la seigneurie de Dinan/nord absorbera la dite seigneurie vicomtale de Poudouvre ; celle-ci perdura au travers de la seigneurie de Plessis-Balisson, au travers de Geoffroy Balisson fils du susdit Alain Brient et frère de la susdite Muriel femme et compagne du dit Geoffroy II de Dinan .

Commentaire de la charte de 1184 (Alain, fils de Brient Vetulus)
- Nature du litige
La charte met en scène un conflit entre les moines de Saint-Magloire de Léhon et les successeurs dans la charge des telonearii de Corseul (agents fiscaux chargés de percevoir les droits de tonlieu).
➝ Ces derniers retenaient indûment une dîme que les moines considéraient comme leur appartenant par concession ancienne des vicomtes du Poudouvre. - Rôle de l’arbitrage
Le litige fut porté devant la cour du duc Geoffroy II de Bretagne (fils d’Henri II Plantagenêt et d’Aliénor d’Aquitaine). Le jugement s’appuya sur le témoignage des anciens habitants de Corseul.
➝ Le duc confirma que la dîme revenait aux moines. - Confirmation seigneuriale
C’est ici qu’interviennent Alain, fils de Brient Vetulus, et son propre fils Geoffroy Balucion (Balisson). Tous deux concèdent solennellement la dîme aux moines, en reconnaissant qu’elle relève de leur fief.
➝ Le sceau d’Alain (un cavalier armé) scelle l’acte : Sigillum Alani filii Brientii. - Témoins et réseaux locaux
– Du côté d’Alain : Hinguandus, doyen de Corseul ; Guillaume fils d’Andol ; Rivallon fils d’Evigilar ; Geoffroy d’Oscaleo ; Even Baudini.
– Du côté des moines : Robert de Calorguen.
➝ Ce cercle de témoins ancre l’acte dans la géographie locale : Corseul, Oscaleo (hameau de Corseul), Calorguen (près de Dinan). - Enseignements généalogiques
– La charte confirme la filiation : Brient Vetulus → Alain → Geoffroy Balisson.
– Geoffroy apparaît ici pour la première fois comme fils d’Alain, avant de fonder la seigneurie du Plessis-Balisson.
– Cet acte établit clairement que la future seigneurie du Plessis-Balisson était incluse dans le fief Vetulus. - Enseignements territoriaux
– La paroisse de Corseul est expressément incluse dans le fief d’Alain Vetulus, transmis « par mes ancêtres vicomtes du Poudouvre ».
– Cela confirme que Corseul faisait partie intégrante du Poudouvre, et que le pouvoir des Vetulus ne se limitait pas à Jugon, mais englobait ce carrefour ancien et stratégique.
7. Portée pour Boquen/Jugon
– La mémoire de Brient Vetulus, donateur reconnu autour de Boquen, trouve ici un prolongement par son fils et son petit-fils.
– L’acte illustre comment les Vetulus, bien qu’en rivalité avec les Dinan, continuaient d’affirmer des droits anciens liés à la vicomté du Poudouvre, y compris face institutions monastiques puissantes comme Léhon.



Encadré comparatif : Jugon et Corseul
- Jugon (Boquen) : au début du XIIᵉ siècle, les Vetulus apparaissent en relation avec l’abbaye cistercienne de Boquen, via Brient le Vieux. Les dons, puis les litiges réglés avec Geoffroy Ier de Dinan, montrent un ancrage fort de la famille Vetulus dans la zone Jugon–Poudouvre.
- Corseul (Léhon) : en 1184, le fils de Brient, Alain, et son petit-fils Geoffroy Balisson, confirment des droits au profit des moines de Saint-Magloire de Léhon, réglant un litige fiscal avec les telonearii. Corseul apparaît ainsi comme un pôle de revenus et de droits, intégré au fief Vetulus.
👉 Lecture croisée : les Vetulus se situent à l’articulation de deux réseaux monastiques puissants – Boquen (Cîteaux) et Léhon (Saint-Magloire) – et utilisent ces alliances religieuses pour consolider la mémoire et la légitimité de leurs droits vicomtaux sur le Poudouvre.
De Brient Vetulus au Plessis-Balisson : destin d’une maison du Poudouvre
La maison Vetulus trouve son origine dans Brient dit le Vieux (Vetulus), haut seigneur du Poudouvre au tournant des XIᵉ et XIIᵉ siècles, souvent en litige avec les Dinan. Brient apparaît dans de nombreuses chartes (Marmoutier, Saint-Melaine de Rennes, Lamballe) et joue un rôle dans la fondation de Boquen.
Son fils Alain, qualifié explicitement de « filius Brientii », est vicomte du Poudouvre. En 1184, une charte le montre confirmant, avec son propre fils Geoffroy Balucion (Balisson), la restitution d’une dîme aux moines de Saint-Magloire de Léhon contre les telonearii de Corseul. Cette pièce capitale situe clairement le fief Vetulus jusqu’à Corseul et rattache la famille à la mémoire des vicomtes du Poudouvre tombés à Conquereuil.
De cette lignée sortent deux branches :
- La branche aînée, éteinte en ligne masculine mais transmise par une héritière, Muliel la jeune, qui épousa Geoffroy II de Dinan. Par elle, la vicomté de Poudouvre s’absorbe dans la puissante maison de Dinan. Leur fils Olivier III confirme dès 1199 les fondations antérieures des Vetulus.
- La branche cadette, représentée par Geoffroy Balisson, qui reçut en apanage le Plessis, juveigneurie du Poudouvre. Son nom s’attache au lieu : le Plessis devient « Plessis-Baluçon », puis Plessis-Balisson. Geoffroy, avec son fils Alain, apparaît comme bienfaiteur de l’abbaye de Saint-Aubin-des-Bois, offrant des revenus situés à la Rogerais (Corseul) et au Treff (Plancoët).
Ainsi, le destin de la maison Vetulus illustre un double mouvement :
- d’un côté, l’absorption de la vicomté du Poudouvre par Dinan,
- de l’autre, la survie d’une lignée cadette, enracinée autour du Plessis-Balisson et des terroirs de Corseul et Plancoët.

